On ne se rend pas au Pico de Teide, aux Canaries depuis Toulouse, comme on peut le faire pour une ascension pyrĂ©nĂ©enne, forcĂ©ment. On ne fait pas l’ascension d’une montagne mĂŞme avec une telle personnalitĂ© sans occulter l’environnement et le pays qui l’entourent, lĂ aussi, Ă©videmment. En tout cas pour nous. J’y ai Ă©tĂ© d’autant plus sensible que nous avions tous les deux l’image d’une Ă®le de Tenerife (Toponyme d’origine amazighe -dans cette langue berbère, Tin Irifi signifie « endroit de la soif »-), obnubilĂ©e par le tourisme de masse, ne sachant pas trop Ă quoi nous attendre. Ce dernier est bien prĂ©sent mais c’est Ă chacun de s’en accommoder et surtout de l’Ă©viter. Ce que nous avons fait.
Donc, rendez-vous en voiture, en écoutant Bebe,
pour se mettre dans l’ambiance ibĂ©rique, Ă l’aĂ©roport de Gerone, en Catalogne espagnole, pour s’envoler avec Ryanair. Visite nocturne dans cette ville, de l’Ă©tonnant (pour les incultes comme moi) vieux centre (Barri Vell) et sa place harmonieuse devant la cathĂ©drale Santa Maria.
Le volcan est dĂ©jĂ lĂ , au bout de trois heures, depuis le hublot, chaperonnant de sa masse toute l’Ă®le. Nous atterrissons sur l’aĂ©roport sud de l’Ă®le, après le retentissement du coup de clairon, dans la cabine (olĂ©ee…). SituĂ© Ă environ une heure de bus (6 euros et quelques et un bus toutes les demi-heures) de la capitale provinciale, nous nous rendons Ă Santa Cruz de Tenerife pour passer la première nuit avant d’envisager le volcan (point culminant de l’Espagne, tout de mĂŞme!).
L’arrivĂ©e dans l’Ă®le puis la ville me fait penser immĂ©diatement Ă l’Andalousie, avec les maisons blanches ou colorĂ©es, la lumière quelque peu aveuglante. L’accent des habitants, qui semble avaler les syllabes finales, lorsqu’on se prĂ©cipite au marchĂ© de Nuestra Siñora de Africa, pour manger des empanadas, me conforte dans cette impression, mĂŞme si mon niveau d’espagnol ne me permet pas encore toujours de nuancer rĂ©ellement.
Photo 1 : Au fond, l’Ă©glise Nuestra Siñora de Africa, en plein milieu de la profusion de fruits tropicaux du marchĂ©. Taganana est situĂ©e derrière l’ultime ligne de crĂŞte.
Pour ne rien oublier, j’ai englouti aussi une pâtisserie, dĂ©nommĂ©e Tocino de cielo, bien sucrĂ©e avec sa couche supĂ©rieure Ă base d’oeuf, ressemblant au dessus d’une crème brĂ»lĂ©e, mais molle, avec sa madeleine en-dessous. Cela m’a fait penser Ă une pâtisserie dĂ©gustĂ©e il y a quelques annĂ©es Ă Malaga.
Photo 2 : Le choix pour les empanadas: poulet pour Claire et viande pour moi.
Et pourtant, les formes de reliefs très dĂ©coupĂ©es, en fines crĂŞtes, sur une partie, en arrière plan de la ville, le substrat volcanique, de couleur noire qui se retrouve jusque dans les matĂ©riaux utilisĂ©s pour la construction des bâtiments, nous rappellent qu’effectivement l’Espagne continentale est assez loin. Le continent africain, Ă Ă peine plus de cent kilomètres Ă l’est est moins Ă©loignĂ©e. Il Ă©voque aussi l’Ă®le de la RĂ©union. Pourtant…pourtant. Tout n’est pas perceptible de prime abord.
Nous filons alors poser nos affaires, Ă la pension Casa Blanca, calle Vieja y Clavijo, dans le centre, oĂą j’avais rĂ©servĂ© quelques jours plus tĂ´t. L’accueil quelque peu nonchalant du patron, me rappelle l’attitude de certains caribĂ©ens. J’adopte donc ma tactique habituelle sans me forcer, ni me dĂ©monter : je souris et je fais ce que je veux dans le respect et la discrĂ©tion, naturellement de tout façon. Bien sĂ»r ça marche. La gentillesse des gens est de toute façon Ă©vidente. Donc, je me sens Ă l’aise tout de suite… Nous sommes en voyage et pas lĂ pour stresser…
Photo 3 : On ne stressera pas Ă la pension Casablanca.
L’après-midi nous emporte dans le centre ville, vers la place d’Espagne, descendant directement par les petites rues piĂ©tonnes, traversant l’itinĂ©raire de la ligne de tramway (eh oui) qui relie le bas (le centre de l’activitĂ© de la ville) et le haut, plus rĂ©sidentiel. Il fait faim mais les boutiques diverses nous retiennent un peu de temps au passage, histoire d’hĂ©siter devant un tee-shirt, copie d’un maillot de l’Ă©quipe de foot-ball des Pays-bas Ă l’effigie du cĂ©lèbre numĂ©ro dix, « Van Aperder ». Enfin, nous trouvons ce qui nous convient. Claire veut manger Ă©quilibrĂ© sans dĂ©roger Ă la culture gastronomique locale, alors :
– Una tortillita, señora?
– Heuu, si, si…
Et voilĂ , une tortilla pour vingt…!!!
L’ensemble du centre de la ville est parsemĂ© de parcs, plus ou moins grands, que nous dĂ©couvrirons au fur et Ă mesure. Les rues sont ombragĂ©es par des rangĂ©es… mais non… Je ne rĂŞve pas! des flamboyants (enfin, je ne crois pas mais ça y ressemble fortement) dont il ne reste que quelques fleurs car ce n’est plus la saison. Mais cela ajoute Ă la confusion des sens. Des neiges saisonnières du pico de Teide, on passe Ă la vĂ©gĂ©tation de type tropical. Sous quel climat sommes-nous?
Photo 4 : Oui, je vous le demande: sous quel climat sommes-nous? Il faisait bien bon. On n’a pas eu l’impression que les gens se couchaient tard. Mais c’Ă©tait apprĂ©ciable de voir des rĂ©unions de mamies sur les terrasses ou les bancs publics en soirĂ©e. (photo de Claire)
Nous passons un moment Ă chercher une librairie qui propose des livres en français. Ainsi, j’ai le temps de regarder les livres sur l’archipel et en mĂŞme temps de le dĂ©couvrir davantage dans la première qu’on nous indique, La Isla, oĂą le dernier jour je craquerai pour un beau livre plein d’images et surtout un Gran atlas tematico de Canarias! Le maillage serrĂ© des librairies du centre nous pousse vers une librairie des femmes (c’est le nom en espagnol), une librairie Le petit coq (en français, mais pour enfants…), une autre oĂą j’achète une carte au cinquante millièmes pour enfin trouver celle qui nous convient, calle Porlier.
Entre temps, nous serons allĂ©s visiter l’Ă©glise de la Conception, de style baroque et toscan, au plafond de bois, construite en roche volcanique, puis crĂ©pie de blanc, le long de la rivière assĂ©chĂ©e descendant des collines. Se situant sur le site du premier Ă©difice construit par les conquistadors, au milieu d’un quartier ancien aux maisons colorĂ©es, l’ambiance en cette après-midi est …comment dire, spirituelle, culturelle! Mince, en ce lundi, c’Ă©tait la fermeture hebdomadaire des musĂ©es. Pas de chance. Vous nous croyez?
Photo 5 : Au fond, Ă droite, l’Ă©glise de la Conception.
Mais il fait chaud et on a soif. Nous rĂ©sistons Ă l’envie de nous arrĂŞter dans le pub irlandais de la place voisine pour remonter vers le haut de la ville et nous contenter d’acheter une bouteille d’eau dans un petit supermarchĂ©. La mondialisation ne nous a pas influencĂ©s… Un petit regard dans le magasin de souvenirs voisin : Claire est tentĂ©e par un magnifique volcan en plastique noir, kitchissime, Ă trois euros… Non c’est pas vrai.
Le bas de la ville est quelque peu dĂ©cevant car il est coupĂ© de l’ocĂ©an par le port, vaste, qui bouche l’horizon et le boulevard urbain qui le longe. Du coup, on ne trouve pas de grandeur dans l’alignement d’immeubles rĂ©sidentiels et des bâtiments officiels qui sont lĂ . C’est dommage, car il y a un bassin avec des murs de verdure. Et en cette fin d’après-midi, l’animation monte doucement avec la rĂ©ouverture de la plupart des magasins. La mairie semble avoir compris. Des panneaux indiquent un projet de rĂ©appropriation piĂ©tonnière des lieux par des sortes de tunnels pour les voies de circulation automobile. Cela n’empĂŞche nĂ©anmoins pas les joggers de s’enflammer Ă la vue des crĂŞtes dĂ©coupĂ©es et dĂ©chiquetĂ©es au nord, vers San Andres.
Photo 6 : La façade portuaire de la ville et les ferries prêts à partir vers les autres îles et surtout vers las Palmas sur Grand Canaria.
Finalement, après cette après-midi bien dense, nous Ă©chouons au cafĂ© atlantico, devant le bassin amĂ©nagĂ©, entre l’Alameda Duque Santa Elena et la place d’Espagne. C’est un lieu de rendez-vous agrĂ©able, lieu de passage important : ce qui me permet, non de regarder les jolies passantes, mais un magnifique dĂ©gradĂ© de lĂ©vriers marrons, tenus en laisse par leur propriĂ©taire. Puisque on est lĂ en voyage, il faut en profiter pour dĂ©guster la gastronomie locale et donc en guise d’apĂ©ro un petit vino tinto, accompagnant un plat de papas arrugadas con mojo (c’est la sauce, huile d’olive, piments, cumin, aĂŻl…. aĂŻe, aĂŻe, aĂŻe, c’est dĂ©licieux).
Photo 7 : Tout ça pour dire que Claire est aussi patiente car je l’ai traĂ®nĂ©e ici tous les jours passĂ©s Ă Santa Cruz. Et tous les jours, on a commandĂ© les papas (et non patatas) arrugadas con mojo. Et, comme on peut le comprendre lĂ©gitimement, je pense qu’elle s’est un peu lassĂ©e des pommes de terres… La Dorada est la bière locale. Devinez oĂą j’Ă©tais assis?
Nous sommes pleins (l’estomac, je veux dire), et nous pouvons donc aller manger! VoilĂ , je ne vais pas vous faire croire que Santa Cruz est la plus belle ville du monde. Mais on s’y est sentis Ă l’aise. Et de voir des choses aussi jolies et intĂ©ressantes, de frĂ©quenter certains mĂŞmes lieux, certains mĂŞmes serveurs (…) nous ont donnĂ© l’impression de vivre un moment familier. Et pour ça aussi c’Ă©tait bien.
"de jolies et intéressantes choses"
je vois , je vois
VIVA SANTACRUZ !
"de jolies et intéressantes choses"
vĂ©gĂ©tales? animales?… sculpturales?
SANTACRUZ …ouais…boff!